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16 juin 2021 Soins psychiatriques : que pense le juge de l’isolement sans consentement ?

La réglementation actuelle relative au placement à l’isolement ou sous contention sans consentement est stricte, en raison des risques d’atteintes à la liberté individuelle. Pour autant, est-elle conforme à la Constitution ? C’est à cette question que le juge vient de répondre…

Soins psychiatriques : la réglementation actuelle est-elle licite ?

Actuellement, lors de la prise en charge en soins psychiatriques, la réglementation autorise le recours à l’isolement et à la contention sans consentement du patient, sous réserve du respect des conditions suivantes :

  • la mise en œuvre de ces pratiques doit faire l’objet d’une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical ;
  • la mesure d’isolement doit être prise pour une durée maximale de 12 heures, qui peut être renouvelée, si l’état de santé du patient le nécessite, par périodes maximales de 12 heures dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités, dans la limite d’une durée totale de 48 heures ;
  • la mesure de contention doit être prise dans le cadre d’une mesure d’isolement pour une durée maximale de 6 heures qui peut, si l’état de santé du patient le nécessite, être renouvelée par périodes maximales de 6 heures dans les mêmes conditions et selon les mêmes modalités, dans la limite d’une durée totale de 24 heures ;
  • le médecin peut, le cas échéant, renouveler ces mesures, au-delà des durées totales prévues. Dans ce cas, il doit informer sans délai le juge des libertés et de la détention (qui peut se saisir d’office pour mettre fin à la mesure) ainsi que, lorsqu’ils sont identifiés :
  • ○ la personne faisant l’objet des soins ;
  • ○ les titulaires de l’autorité parentale ou le tuteur si la personne est mineure ;
  • ○ la personne chargée d’une mesure de protection juridique relative à la personne faisant l’objet des soins (tuteur, curateur) ;
  • ○ son conjoint, son concubin ou son partenaire de PACS ;
  • ○ la personne qui a formulé la demande de soins ;
  • ○ un parent ou une personne susceptible d’agir dans l’intérêt de la personne faisant l’objet des soins ;
  • ○ le procureur de la République ;
  • le médecin doit également informer ces mêmes personnes lorsqu’il prend plusieurs mesures d’une durée cumulée de 48 heures pour l’isolement et de 24 heures pour la contention sur une période de 15 jours ;
  • le cas échéant, le médecin doit prévenir le patient de son droit de saisir le juge des libertés et de la détention pour qu’il ordonne la mainlevée de la mesure et l’informer des modalités de saisine de ce juge ;
  • en cas de saisine, le juge des libertés et de la détention doit statuer dans un délai de 24 heures ;
  • une mesure d’isolement ou de contention prise au moins 48 heures après une précédente mesure d’isolement ou de contention constitue une nouvelle mesure. En-deçà de ce délai, sa durée s’ajoute à celle des mesures d’isolement et de contention qui la précèdent.

Cette réglementation vient d’être déclarée contraire à la Constitution pour les raisons suivantes :

  • il n’est pas prévu de contrôle systématique de ces mesures pour le juge des libertés et de la détention ;
  • il n’est pas explicitement prévu que le juge soit informé de chaque renouvellement des mesures d’isolement et/ ou de contention, ce qui implique qu’elles pourraient potentiellement être mises en œuvre sur de longues périodes, et cela sans aucun contrôle judiciaire.

Pour autant, notez que cette réglementation va continuer à s’appliquer jusqu’au 31 décembre 2021, car sa suppression immédiate reviendrait à empêcher toute possibilité de placement à l’isolement ou sous contention des personnes admises en soins psychiatriques sous contrainte.

Le gouvernement est donc invité à revoir sa copie d’ici là. A suivre…

Source : Décision n° 2021-912/913/914 QPC du 4 juin 2021

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